Mort, pulsion de mort
Aujourd'hui, le djihadisme, en particulier, répand comme une religion politique une érotisation de la violence qui consiste à mobiliser la pulsion de mort inhérente aux être parlants que nous sommes : viols et décapitations s'en sont suivis. Ces actes se revendiquent, au plan politique, comme des vengeances et agissent comme consolations voire récompensent des frustrations et des colères..... D'autres s'aperçoivent que la pulsion de mort éveille des énergies et applaudissent à l'enthousiaste djihadiste pour regretter l'affadissement de la foi chrétienne..
Les béatitudes du Christ : une façon de déculpabiliser la souffrance ?
Je ne crois pas que la psychanalyse surplombe l'expérience religieuse et je suis désolée si j'ai pu donner cette impression. Je ne crois pas avoir dit non plus que la foi chrétienne se réduise à la déculpabilisation de la souffrance. Plus radicalement, la foi peut changer le structure psychique d'une personne et si les sensations et les émotions comme le plaisir et la souffrance ne sont pas déniées, elles sont susceptibles de trouver aussi d'incommensurables sublimations.
L'Europe comme contrepoids
Je suis une européenne de naissance. Toute ma vie j'ai entendu de mon père qu'il n'y a qu'une culture, l'européenne. Aujourd'hui l'Europe est menacée d'éclatement entre souverainistes et progressistes, libéraux et écolos, la situation est pour le moins chaotique. Mais sans l'Europe, nous risquons le chaos, le vrai en fait. Parce que l'Europe est le contrepoids, y compris dans sa fragilité même, entre une Amérique auto-suffisante, une Chine qui se durcit et un Moyen-Orient toujours très conflictuel.
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La nation est un antidépresseur, à condition de se relier aux ensembles supérieurs, régionaux et culturels que sont par exemple l'Europe. Un antidépresseur qui ne peut plus se passer du « genre humain » mais se doit de prendre et d'interpréter la mémoire des religions constituées aussi bien que de refonder l'humanisme universaliste lui-même qui s'en est séparé.
Une étrangeté transférable, constitutive de nos identités
La psychanalyse ne prétend pas que tout est sexuel. Elle ne propose ni modèle, ni une « conscience conservatrice » à l'encontre de la ferveur religieuse, ni une corrélation entre foi et raison. Elle repère la transcendance dans le besoin de croire qui sous-tend le désir de savoir. La psychanalyse découvre que l'étrangeté radicale, constitutive de nos identités, est transférable. Qu'est ce que « transférable » ? On appelle transfert le lien qui s'établit entre l'analyse et l'analysant, « grâce auquel nous apprenons que parfois ce que nous croyons nôtre nous est étranger et que ce que nous croyons étranger est nôtre parfois ». C'était la définition de Dieu par saint Augustin.
in « La personne au centre », entretien avec Julia Kristeva . ESPRIT, n°456